Capsules d'histoire - Mémoire des femmes
Ozias Leduc et le dessin
Dès ses premières années à l’école modèle de Saint-Hilaire, Ozias Leduc dessinait dans des livres que son maître lui avait donnés ; il courait la campagne pour trouver des roches ou de la glaise de différentes couleurs qu’il pourrait délayer et utiliser pour dessiner. Plus tard, il développa une très grande habileté dans ce domaine et il exécuta des milliers de dessins au cours de sa carrière. Alors qu’il était hospitalisé en 1955 à l’hôpital de Saint-Hyacinthe, il continuait à dessiner avec des crayons Prismacolor et cela jusqu’à quelques jours avant sa mort.
L’artiste dessinait avant tout au crayon à mine noire ou au fusain, parfois à l’encre, très rarement à la craie blanche ou grise, à la gouache et presque jamais au pastel ou au crayon de couleur ; il lui arrivait très rarement d’exécuter des retouches à l’huile. Il dessinait sur toutes sortes de papier : papiers blancs, crème ou de couleur, enveloppes, verso de lettres dactylographiées, tout pouvait servir pour un dessin. Il dessinait même au verso de feuilles déjà dessinées. Ses dessins étaient de différents formats, de trois ou quatre centimètres de côté jusqu’à plusieurs dizaines, mais généralement, ils étaient petits. Les dessins exécutés dans le cadre de ses décorations d’églises étaient évidemment des esquisses composées pour mieux déterminer ce que serait la future peinture à l’huile. Ces dessins étaient extrêmement nombreux et Leduc pouvait facilement exécuter de 30 à 50 dessins dans la préparation de la décoration d’une église.
Cependant, plusieurs dessins étaient de type profane : c’étaient des paysages, des portraits, ou parfois des commandes plus rares comme des maquettes pour des rideaux de scène ou les décors de la pièce Madeleine d’Ernest Choquette présentée à Saint-Hilaire en 1928. Il prépara plusieurs dessins comme illustrations de livres ou de brochures à caractère religieux.
Son œuvre de dessins culmina avec les Imaginations, une série de 52 dessins exécutés de 1936 à 1942, qui sont avant tout des paysages imaginaires dessinés à partir de ses souvenirs du mont Saint-Hilaire. « Le dessin, dira Leduc, c’est ce qu’il y a de plus intellectuel dans un tableau. » C’est lors du dessin que s’organisent les éléments déterminants dans la future œuvre : lumière, ombre, composition, modelés. La réalisation d’études, d’esquisses préparatoires est un moment d’intense stimulation intellectuelle pour l’artiste. C’est ce qui explique la primauté du dessin dans la création des œuvres d’Ozias Leduc.
— Pierre Lambert
La capsule a paru dans L’Oeil régional, 27 novembre 2024, p. 23.