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La naissance du vieux village de Belœil
C’est à partir des églises que se sont développés nos villages d’autrefois et Belœil n’a pas échappé à la règle. À compter de 1772, date d’ouverture de la chapelle, puis de 1787, année d’inauguration de l’église, le petit noyau central de Belœil se développa très lentement par l’installation des marchands, des artisans et des professionnels qui profitaient de ce lieu de rassemblement que constituait l’église.
Au début du siècle dernier, n’existaient encore que le chemin du bord de l’eau (la rue Richelieu d’aujourd’hui) et le chemin de montée (la rue Saint-Jean-Baptiste, appelée aussi chemin de ligne) qui permettait aux habitants de l’intérieur des terres d’avoir accès à l’église. Il n’y avait pas encore de village à proprement parler, seulement quelques résidences et commerces sur le bord de l’eau. En 1806, un droit de passage était accordé sur un chemin (la future rue Saint-Mathieu, qui portera ce nom à compter de 1845) qui menait à des habitations en bordure du cimetière. Il faudra ensuite attendre près de 40 ans avant qu’apparaissent les rues transversales du Vieux-Belœil.
En 1840, Joseph Cartier, qui avait dirigé avec son frère Augustin un magasin général à Belœil, mettait en vente la terre du magasin située entre les rues Saint-Jean-Baptiste et Saint-Mathieu, c’est-à-dire là où se trouve le Vieux-Belœil. L’avocat Pierre-Louis LeTourneux le faisait acheter par sa femme. Marguerite Fouquet. A partir de 1843, LeTourneux entreprenait le lotissement méthodique de cette terre en la divisant en un grand nombre de lots.
Les lots étaient pour la première fois séparés par des rues : la rue Saint-Charles (l’actuelle rue Laurier), Saint-Louis (maintenant Mgr-Laval), Napoléon (l’actuelle rue Guertin; sur certains documents, on trouve Saint-Napoléon!) Seule la rue Saint-Mathieu a conservé son nom après 150 ans. Les lots du quadrilatère situés entre les rues Laurier et Mgr-Laval mesuraient 50 pieds sur 90 et furent tous vendus le 2 février 1843 en bandes de deux dans le sens de la longueur. Les lots des autres quadrilatères mesuraient 57 pieds sur 90.
Tous les acheteurs étaient contraints de respecter les conditions suivantes quant à l’utilisation de leur lot :
· Ériger une bâtisse dans l’année suivant l’achat
· Ne pouvoir détruire les bâtisses construites
· Bâtir en ligne avec la rue, sans que des perrons ou galeries excèdent sur la voie publique
· Clôturer les terrains d’une façon mitoyenne avec les voisins
· Entretenir sa part de rue en plus d’un trottoir de 4 pieds de largeur
· Entretenir la rue Saint-Mathieu à parts égales avec tous les propriétaires voisins.
C’était les premiers efforts d’urbanisme dans Belœil! Dame LeTourneux mourut en 1854 et son mari obtint l’autorisation de concéder de nouveaux lots. C’est ainsi qu’en 1861, Pierre-Louis LeTourneux vendait un lot (sur la rue Guertin) à la Corporation de Belœil à la condition expresse que celle-ci y construise un marché public, lequel fut effectivement ouvert au cours des années suivantes. En 1885, on s’occupait de faire installer sur le terrain municipal une grosse balance « pour peser voiture, charge, animal et autre chose quelconque, en n’importe quelle saison de l’année ». En 1945, c’était là que se trouvait la station de « pompe à feu » de Belœil, avec une tour de 60 pieds de hauteur pour le séchage des boyaux.
– Pierre Lambert, 1994 (mis à jour en 2020)