Capsules d'histoire - Culture et Société
La vie culturelle à Belœil au tournant du XXe siècle
On aurait tort de penser que la vie culturelle à Belœil est beaucoup plus développée aujourd’hui qu’elle pouvait l’être au début du XXe siècle, par exemple. Compte tenu du fait que la population beloeilloise était dix fois moins importante, c’est tout le contraire qui se produisait dans plusieurs domaines des arts, au théâtre, en architecture, en peinture, en littérature, notamment.
D’une façon générale, les paroissiens étaient en contact avec la musique à l’église dans le cadre des offices religieux. L’organiste et les chantres introduisent l’assistance à la musique religieuse semaine après semaine. On pourra consulter le Cahier d’histoire no 59 pour mieux connaître les caractères de la vie musicale à l’église de Belœil autrefois. Cependant, on jouait aussi de la musique en beaucoup d’autres occasions, comme lors des fêtes patriotiques et des représentations théâtrales. À l’occasion des festivités de la Saint-Jean-Baptiste et de la Confédération, des harmonies divertissaient les paroissiens. Beloeil possédait par ailleurs une troupe de théâtre, le Cercle athlétique et dramatique de Belœil, qui montait sur les planches dans la salle située au 961 Richelieu, devenue en 1977 le Club de l’Amitié et maintenant détruite. Des chefs d’orchestre, des pianistes, accompagnaient les représentations théâtrales.
En 1907, un pharmacien du nom de Wilfrid Lecours vient s’installer à Belœil dans une vieille maison de pierre, au 380, rue Richelieu. Il rénove soigneusement cette maison selon les préceptes de l’architecture Arts and Crafts, précurseur d’un retour au respect des bâtiments anciens. L’Abitation des Lecours devient un lieu de rencontre des gens cultivés et des amateurs d’art de Belœil et des amis montréalais du pharmacien. Celui-ci s’intéresse à la peinture
et en vient à posséder l’une des plus importantes collections de tableaux au Québec, avec des oeuvres, notamment, de Beau, Franchère, Hébert et Leduc. Ozias Leduc fréquente les Lecours, exécute un médaillon en plâtre de madame Lecours et un fusain de tous les membres de la famille. Wilfrid Lecours possède par ailleurs une collection d’antiquités et achète des vieux meubles canadiens chez les fermiers environnants qui donnent une touche rustique à L’Abitation. « L’Abitation de Belœil devient un relais à la campagne pour l’élite intellectuelle et artistique de Montréal », comme l’écrit André Laberge.
L’un de ces intellectuels est Robert de Roquebrune, qui habite Belœil de 1912 à 1918, au 784 rue Richelieu, près du pont Jordi-Bonet. Au cours de ces années, il s’adonne à ses travaux littéraires et publie notamment un Hommage à Charles-Michel de Salaberry, Héros de Châteauguay, une plaquette de 18 pages, datée de « La Broquerie, Belœil, octobre 1913 ». Le passage de Roquebrune à Belœil est précieux par les descriptions qu’il nous a laissées de ce petit groupe de famille qui s’intéressait au monde des arts à Belœil au début du XXe siècle.
— Pierre Lambert, 1999 (mis à jour en 2020)