Capsules d'histoire - Le patrimoine bâti
L’histoire du Vieux-Moulin
Pierre Gadbois, SHGBMSH
Le bâtiment connu aujourd’hui sous le nom de Vieux-Moulin n’a été un moulin à vapeur que pendant une très courte période. Le Vieux-Moulin a abrité une suite ininterrompue de marchands et de commerçants qui l’ont utilisé comme magasin et résidence, mais surtout comme hangar. Construit vraisemblablement en 1799 par le négociant Louis Marchand, c’est le seul bâtiment de type monumental à Belœil et l’un des rares spécimens dans toute la vallée du Richelieu.

Encerclé, Le Vieux-Moulin, vu depuis le quai de chargement de Saint-Hilaire. (SHGBMSH, coll. Marcel Paquette)
En 1855, le bâtiment devient la propriété de La Société du Moulin à Vapeur de St-Matthieu de Belœil. Fondée au moment de l’abolition du régime seigneurial qui obligeait jusqu’alors les censitaires à utiliser le moulin banal du seigneur pour moudre leur grain, cette société, dirigée par le Dr Jean-Baptiste Allard de Beloeil, réunit un grand nombre de bourgeois, d’agriculteurs, de marchands et de membres des professions libérales de Belœil, de Saint-Hilaire et des villages environnants pour créer l’une des plus importantes sociétés commerciales de la région. Les actionnaires confient aux firmes montréalaises Lacroix et frères, constructeurs de moulins, et Milne & Milne, ingénieurs en mécanique, la transformation du bâtiment en moulin à farine et en moulin à carde. Les activités débutent en juin 1856 et plusieurs ouvriers spécialisés se retrouvent alors à Belœil comme employés du moulin. Malheureusement, à peine un an plus tard, le 7 juillet 1857, la chaudière du moulin à vapeur explose, entraînant la mort de huit personnes qui se trouvaient à l’intérieur du bâtiment. L’accident marque la fin des activités de cette société, mais est à ce point important que, malgré la courte durée de la société, le bâtiment conserve le nom de Vieux-Moulin.
Deux ans plus tard, la société vend le bâtiment au marchand François Charland et il retrouve sa vocation de hangar et d’habitation. Au début du XXe siècle Le Vieux-Moulin devient la première maison de la poste d’envergure de Beloeil, propriété du maître de poste Louis Comtois. Ses propriétaires subséquents le convertissent en édifice à logements et en bureaux. Entre 1920 et 1930, un incendie ravage la toiture, mais plutôt que de la reconstruire en pente à deux versants, les propriétaires décident de simplement transformer le bâtiment dans le style boîte-carrée ou cubique en vogue à cette époque, style qu’il conserve jusqu’en 1999. C’est son acquisition par un groupe d’architectes dont Hubert Chamberland, qui sauve le bâtiment de la démolition. Nous lui devons sa restauration dans un style s’apparentant au style néo-classique de type monumental d’origine. Le bâtiment de plus de 200 ans, unique à Belœil et dont on ne retrouve qu’une centaine d’exemplaires au Québec, est le plus vaste bâtiment ancien non religieux en pierre de l’inventaire patrimonial de Beloeil.
La capsule a paru dans L’Oeil régional, 25 mars 2025, p. 26.