Capsules d'histoire - Mémoire des femmes
Rachel Marie Louise Guillot Clément, fromagère (1882-1966)
Venue de France, cette femme a apporté au Québec le savoir acquis dans son terroir d’origine. Son fameux camembert a fait le bonheur de bien des gourmets en Amérique pendant plusieurs décennies.
Fille d’agriculteurs née à Francueil près de Tours, Rachel Guillot épouse, en 1901, Sylvain Adrien Clément, vigneron. Un an plus tard, naît leur fils Roger. C’est en Touraine puis en Normandie que Rachel acquiert, entre 1904 et 1908, sa formation de fromagère. La famille émigre au Québec en 1911 et réside entre autres à Québec, Percé, Lévis et Duhamel où le couple fabrique du cheddar canadien. Demeurée à Montréal en 1915 pendant que son mari est mobilisé en France, Rachel travaille dans des maisons privées. Puis, employée de maison à la ferme laitière David Leclerc à Saint-Basile-le-Grand, elle commence à fabriquer son camembert dans la cave de la ferme. Le camembert Madame Clément est né ! Sylvain Clément revient en 1918 et le couple acquiert la ferme Leclerc en 1924 qu’il revend en 1926 pour établir une laiterie-fromagerie à McMasterville. Malgré un terroir et un climat très différents de ceux de la France, à force de persévérance, Rachel parvient à fabriquer un produit de qualité. Dans les villages voisins, on connaît peu le camembert, mais on l’achète. Avec l’interruption des importations de l’Europe durant la Seconde Guerre mondiale, la production des Clément augmente considérablement avec des ventes jusqu’à Montréal, Toronto et dans provinces de l’Ouest. L’après-guerre voit le retour des fromages de France, mais le Madame Clément maintient sa renommée. À la mort de son père en 1951, Roger reprend l’entreprise jusqu’à sa fermeture vers 1975. Vivant avec son fils, son épouse et leurs dix enfants, Rachel gère la maisonnée et demeure active en dirigeant les employés jusqu’à son décès à 83 ans, en 1966. Kraft, Damafro et Agropur reprennent le camembert Madame Clément qui disparaît peu à peu des étalages. Ses descendants se souviennent de cette femme aimante et indomptable qui savait imposer son autorité et diriger les affaires sans peur et sans reproche !
— Louise Langevin
Références
Pierre-Paul Mongeau, Paroisse Sacré-Cœur de Jésus de McMasterville — Belœil (secteur de la gare) Comté de Verchères (Québec). 1917-1982. 65e Notre album familial, 1982« M. Roger Clément raconte », p. 140-141.
Rolland Robidoux, Ancêtres Clément depuis 1800 à 1998,d. [1998 ou après], document d’archives privées, exemplaire de Cécile Clément Germain (Belœil).
Cécile, Philippe et Rose-Marie Clément, entretien avec l’autrice, Belœil, 19 janvier 2024.