Capsules d'histoire - Notables et ancêtres
Les premiers habitants de Belœil
Qui étaient les premiers habitants de Belœil? À quel moment arrivèrent-ils? D’où venaient-ils? Il n’est pas toujours facile de répondre à ces questions.
La première personne à entreprendre de couper la forêt, à commencer des défrichements, à bâtir une petite maison fut le fermier du seigneur Charles Le Moyne qui venait d’obtenir la seigneurie de Belœil des mains de Joseph Hertel, le premier seigneur. C’était en 1711. Mais comme on était en guerre contre les Anglais qui descendaient le Richelieu vers Québec, il fallut tout abandonner. On ignore même le nom de ce premier défricheur de Belœil.
Le développement sera repris 12 ans plus tard, en 1723. On sait qu’à ce moment, les défrichements étaient en cours sur huit terres dans le premier et le deuxième rang. Les colons abandonnèrent tous au bout d’un an ou deux.
En fait, on peut dire que la colonisation de Belœil débuta sérieusement à compter de 1725 et quinze ans plus tard, les trois quarts des terres le long du Richelieu avaient été concédées. Qui étaient-ils, ces premiers concessionnaires de Belœil? Les tout premiers d’entre eux étaient des militaires. Le seigneur Le Moyne était un officier militaire, on était tout près du fort de Chambly, et des soldats, après avoir fait leur service, s’essayèrent à l’agriculture. Ce fut un échec.
Évidemment, dans 90 % des cas, les nouveaux arrivants étaient des cultivateurs arrivant des paroisses voisines. Et une fois sur trois, les individus qui se présentaient chez le notaire pour signer le contrat de concession étaient des jeunes, des célibataires, des adolescents accompagnés de leur père ou d’un tuteur, venus obtenir une terre sur laquelle ils s’installeraient après leur mariage. Dans 85 % des cas, ces nouveaux Belœillois ne feront pas souche. Le travail sera si pénible qu’ils abandonneront au cours des années suivantes. Ce n’est que graduellement, à partir des années 1750-1780, par exemple, que les vieilles familles de Belœil prendront souche dans la paroisse. En fait, les vieilles familles d’aujourd’hui, comme les Préfontaine, les Bernard, les Choquette, etc., sont rarement arrivées avant 1770.
Mais d’où venaient précisément ces premiers colons? Des paroisses voisines du Bas- Richelieu? Seulement une fois sur cinq. La plupart du temps, ils arrivaient de l’île de Montréal ou des paroisses de la Rive-Sud, surtout de Boucherville, Verchères, Rivière-des- Prairies et Pointe-aux-Trembles. La première famille à affronter l’hiver à Belœil, donc la première famille qui résidait à Belœil à longueur d’année était peut-être celle de Jean Catudal, dit Saint-Jean, et de son épouse Angélique Chaunière qui habitaient sur le territoire autrefois occupé par l’usine de la I.C.I. (maintenant disparue) à McMasterville, vers 1725-1740. La famille Désautels est également une des toutes premières familles de Belœil.
Quelle était la population tout au long de ces premières décennies d’histoire? J’estime que vers 1730 il y avait entre 15 et 20 personnes qui vivaient à Belœil; et environ 60 vers 1740. Mais la construction de la chapelle en 1772 et l’arrivée des premiers marchands fera « gonfler » la population a 350 personnes.
À cette époque, la vie était extrêmement pénible. Tout le monde était pauvre. La première génération de défricheurs était une génération qui se sacrifiait à faire reculer la forêt pour assurer un peu d’aisance aux suivantes. Trente, quarante ans après l’arrivée a Belœil du jeune homme de Verchères ou de Boucherville qui se serait tué au travail, son fils aîné profiterait du travail de cette vie de sacrifice. « Sacrifice », voilà un mot qui ne cadre pas beaucoup avec notre société de consommation…
— Pierre Lambert, 1994 (mis à jour en 2020)