Capsules d'histoire - Patrimoine bâti
Les plus vieilles maisons de Belœil
L’identification des plus vieilles maisons de Belœil a toujours été un sujet de grand intérêt, de la part d’abord de ceux qui ont la chance de posséder une maison ancienne qui pourrait avoir une valeur patrimoniale, mais aussi des citoyens en général qui ont plaisir à avoir sous les yeux des témoins de la vie ancienne de la paroisse, témoins qui peuvent avoir plusieurs siècles d’existence.
« Plusieurs siècles d’existence », c’est beaucoup dire, dans le cas de Belœil. Les propriétaires de vieilles maisons ont maintenant abandonné l’idée de voir remonter leur résidence aux dernières années de la Nouvelle-France. Le Vieux-Moulin ou la Maison Villebon ne remontent pas à la fin du Régime français comme on l’avait, affirme il y a quelques années, mais à une époque plus récente.
L’examen de l’apparence extérieure ou la connaissance de l’architecture ne suffit pas pour assigner un âge à un vieux bâtiment; il faut aussi faire des recherches historiques surtout dans les minutiers des notaires devant lesquels on a passé des contrats de construction ou de vente des propriétés.
Dans le cas de Belœil, la plus vieille maison dont on peut supposer l’existence est celle du fermier du seigneur LeMoyne, construite en 1711 et incendiée par après. La colonisation commence sérieusement vers 1725-1730. Les plus anciennes maisonnettes de bois pourraient remonter à cette époque. Ces petites bâtisses étaient ce que l’on appelle des maisons de défricheur, et c’était souvent des abris qui servaient pour l’été avant que le défricheur reparte à l’automne pour sa paroisse d’origine âpre avoir défriché une partie de sa terre. Certaines de ces premières maisons ont pu être construites très solidement ou être solidifiées au cours des générations suivantes, de telle sorte que l’on pourrait trouver, parfois masquées par des revêtements postérieurs, des structures de bois remontant aux années 1730-1770.
Actuellement, on croit que la plus vieille maison de bois de Belœil est la maison Robert, située au 1100, Richelieu. Cette maison a été construite vers 1750 par le cultivateur Joseph Robert. Elle a plus tard été allongée probablement pour assurer le logement à des parents âgés. Les lucarnes sont également postérieures.Les maisons de pierres sont construites au bout d’une génération ou deux par le fils ou le petit-fils de la famille. Mais il arrive que le propriétaire n’appartienne même pas à la famille du défricheur initial : il avait de l’argent, a achète une terre et se construit sa maison en pierre.
À Belœil, la construction du presbytère en pierre en 1770-1772 a marqué le départ de la paroisse sur des bases solides en attirant plusieurs familles paysannes dont quelques-unes construisirent leur maison en pierre au cours des années suivantes. Rappelons tout de suite que le presbytère est considéré comme le plus vieil édifice de pierre à Belœil. Le Vieux-Moulin tout à côté date de 1797 environ. Quel âge ont les vieilles résidences en pierre de la paroisse? Un peu plus de deux cents ans, dans le cas des plus anciennes. La vingtaine de maisons de pierres que nous possédons date la plupart du temps des années 1770-1830; la maison Villebon a été construite assez tardivement, en 1844.
Le début de la colonisation (et par conséquent l’ouverture des chemins de rang) est un élément à considérer quand on cherche à déterminer l’âge d’une résidence ancienne. Une maison de bois peut dater des années 1730-1750 sur la rue Richelieu, mais cette maison sur le boulevard L’Heureux, la rue Trudeau ou au Ruisseau peut difficilement être plus ancienne que 1770, 1790 ou 1795, époque de construction des routes a ces endroits. Cela vaut évidemment pour les maisons de pierre, mais les différences d’âge sont beaucoup moins marquées entre les maisons de pierre de la rue Richelieu, construites souvent vers 1770-1790, et celles du Ruisseau, construites vers 1810-1830.
Qu’il s’agisse d’une maison de bois ou de pierre, un bâtiment ancien mérite qu’on en prenne soin. Espérons qu’il est fini le temps ou l’on pouvait raser une maison de deux cents ans pour bâtir à sa place une maison de style canadien… (Cela s’est vu il y a dix ans sur le boulevard L’Heureux Est). De plus en plus, heureusement, les Belœillois prennent conscience de l’importance et de la valeur de leur patrimoine bâti.
— Pierre Lambert, 1994 (mis à jour en 2020)