Capsules d'histoire - Patrimoine bâti

Un patrimoine en pierre à Mont-Saint-Hilaire

 

Maison patrimoniale Saint-Hilaire

Vue ancienne du 994, chemin de la Montagne : un bel exemple d’architecture monumentale, fonds SHBMSH.

Au début de la colonisation du territoire de Mont-Saint-Hilaire, à la fin du XVIIIe siècle, la plupart des constructions résidentielles étaient en bois. Ce n’est qu’au tournant du XIXe siècle qu’apparurent les premières maisons de pierre. Matériau noble car il représentait la durabilité, la longévité et une certaine aisance matérielle, la pierre faisait l’envie des colons. Mais cela prenait de la patience et un certain savoir-faire pour ériger une telle demeure. En général, on devait compter plusieurs mois sinon quelques années, selon les dimensions du bâtiment, pour terminer les travaux. Souvent, le charpentier engagé devait d’abord construire une première maison en bois pour permettre aux habitants d’y vivre en attendant l’autre maison. Par la suite, on avait recours à un maçon pour monter les murs de pierre ; cela prenait du temps car il fallait laisser durcir le mortier pour éviter l’affaissement avant la fin des travaux.

Dans les actes notariés et autres documents officiels de cette période, les habitations sont rarement décrites sauf si elles étaient construites en pierre. Ainsi, au recensement de 1851, on compte 18 maisons de pierre dans la paroisse. En 1984, l’historien Armand Cardinal a effectué un inventaire des maisons de pierre hilairemontaises. Si on exclut les édifices institutionnels comme le presbytère, on constate qu’il n’y a que huit maisons de pierre de plus de cent ans encore existantes. Quatre sont situées sur le chemin des Patriotes, trois dans la montagne et seulement une sur la Grande-Allée. La plus ancienne est la maison Charles-L’Heureux située au 209, chemin des Patriotes Sud, pour laquelle nous consacrons une autre chronique dans les capsules d’histoire.

Comme elles ont toutes été construites après la Conquête, l’architecture de ces maisons s’inspire à la fois de l’influence française, anglaise et américaine, mais elles sont adaptées à notre climat. Toutes les maisons présentent une pierre foncée car on puisait le matériau directement de la montagne. Un bel exemple est la maison Guerin située sur le chemin des Moulins (quoiqu’il s’agît en fait de l’ancien moulin seigneurial) reconstruit en 1844 avec les pierres du premier moulin. Parmi nos huit spécimens, nous avons la chance de rencontrer deux modèles d’architecture monumentale situés dans le secteur de la montagne : le 994 du chemin de la Montagne et la maison Monast-Lahaise du 411 chemin des Moulins, dont vous trouverez son histoire dans une autre chronique des capsules d’histoire. L’historien Michel Lessard, dans son Encyclopédie de la maison québécoise mentionne qu’il n’existe qu’une centaine d’exemples de ce type d’architecture au Québec.

On notera également que les trois maisons de pierre rencontrées sur le chemin des Patriotes Nord révèlent trois types d’architecture bien différents : Style québécois d’un étage et demi avec un toit à larmier percé de lucarnes (970) ; inspiration américaine avec un toit à mansarde sur deux versants (924) ; et finalement, un exemple d’architecture d’esprit français mais qu’on retrouve normalement en milieu urbain, avec ses deux murs coupe-feu (476).

Armand Cardinal a ouvert une porte qui nous révèle que nos ancêtres hilairemontais suivaient la tendance à la mode pour construire leur demeure, tout en utilisant un matériau de qualité : la pierre de la montagne ; ce qui donne à nos vieilles maisons un cachet supplémentaire duquel on peut s’enorgueillir.

— Anne-Marie Charuest, 2021